Le bocage est une identité paysagère composée de champs agricoles, cultivés ou pâturés, séparés par des talus supports de haies, de taillis ou d’alignements plus ou moins continus d’arbres et d’arbustes. Il comporte également des éléments paysagers comme les chemins creux et les mares. Caractéristique de l’Ouest de la France, il existe sous des formes variées selon les régions.

Ce paysage résulte d’une modification de l’environnement par les activités humaines et notamment les pratiques agricoles. Le bocage est donc directement influencé par le contexte socio-économique des territoires au fur et à mesure des années.

Les rôles du bocage

 

Le bocage fut créé à l’origine pour séparer les parcelles agricoles selon les propriétaires, la qualité du sol mais aussi pour protéger les cultures et le bétail. La disparition progressive du bocage lors du remembrement du XXème siècle nous a fait prendre conscience de ses multiples rôles essentiels.

 

La limitation du ruissellement et de l’érosion

Exemple du rôle d’un talus antiérosif (Pleyben , Finistère, source: EPAGA, 2020)

Les talus sont des barrières physiques aux eaux de ruissellement : ils freinent, retiennent l’eau et évitent que la terre des cultures ne soit emportée. Dans les campagnes sans bocage, les pertes de sol peuvent être très importantes lors des fortes pluies lessivantes. L’érosion de sols est alors visible par des coulées de terre ou de boues vers les parties basses des parcelles.

La présence de talus en bas de parcelle permet une rétention et une infiltration de l’eau dans le sol, aéré par les racines des arbres. Le ruissellement est donc ralenti et limité : c’est l’effet tampon.

 

Une épuration de l’eau 

L’eau retenue par le talus s’infiltre lentement dans le sol et permet alors la mise en place des processus d’épuration de l’eau : les nutriments apportés aux cultures via les engrais ou  encore les produits phytosanitaires, sont assimilés par les végétaux du talus ou dégradés par les micro-organismes du sol. Les nitrates sont consommée par les bactéries dénitrifiantes du sol et transformés en nitrites puis en ammonium, cet élément étant plus facilement assimilable par les végétaux.

 

L’effet brise-vent, une protection pour le bétail et les cultures

Les haies bocagères sont des protections physiques au vent. Elles vont servir de protection ” coupe-vent “ pour le bétail face aux aléas climatiques. Sans abri, les animaux vont consommer une grande partie de leur énergie pour réguler leur température au détriment de la production de lait ou de viande.
Sur les parcelles cultivées, le rôle de protection microclimatique du bocage va réduire la vitesse du vent et ainsi limiter le dessèchement des cultures. De nombreuses études ont mis en évidence une perte de rendement des cultures à proximité immédiate de la haie (phénomène de concurrence des arbres et d’une luminosité moindre), mais ensuite, un gain de rendement sur une distance 10 à 15 fois celle de la hauteur de la haie.

 

Source: Guide technique pour la conception de HAIES CHAMPÊTRES UTILES en AGRICULTURE dans le CANTAL (https://afac-agroforesteries.fr/wp-content/uploads/2015/02/guide-haies-champ%C3%AAtres-cantal-2015.pdf)

 

Les haies bocagères permettent également de réduire la verse des cultures, un accident de végétation qui se traduit par une couche des cultures au sol et qui entraine une baisse importante du rendement.

 

Une ressource énergétique

Le bois, si son exploitation est gérée de façon réfléchie et durable, est une ressource d’énergie renouvelable. Les haies bocagères permettent une production de bois déchiqueté, ou “bois plaquette”, utilisé pour l’alimentation de chaudières à bois. Les plaquettes bocagères conviennent pour les chaufferies de petite et moyenne taille, pour lesquelles la qualité de la plaquette (granulométrie, taux d’humidité,…) est importante. Ces chaufferies sont utilisées pour le chauffage de groupes d’habitations, de bâtiments agricoles, de piscines, d’établissements scolaires, d’hôpitaux …

Pour en savoir plus sur la filière Bois énergie:

 

 

Patrimoine naturel et biodiversité

Le paysage bocager, de par sa grande variété de formes et de composition, contribue à la diversification des paysages et à la lutte contre l’homogénéisation des territoires. Valoriser ce paysage rural permet également de mettre en avant l’agriculture et l’amélioration du cadre de vie, renforçant alors l’attractivité des territoires.

Le bocage est un milieu naturel accueillant une grande diversité floristique et faunistique. Son organisation verticale (strates de végétation herbacée, arbustive et arborée) et horizontale (réseaux de haies) lui confère de nombreux rôles écologiques : lieux de refuge, d’alimentation et de reproduction pour la faune, corridor écologique pour permettre le déplacement des espèces naturelles entre les refuges de biodiversité (zones humides, prairies, landes, forêts, mares…). Le réseau complexe de haies, cours d’eau, mares et bosquets s’identifie comme étant la Trame Verte et Bleue.

 

La Trame Verte et Bleue (source: Le pays du Berry Saint-Amandois)

 

Vidéo:Biodiversité en sursis: le rôle du bocage pour les reptiles et amphibiens“.

De plus, la proximité des parcelles cultivées permet aux auxiliaires de cultures et aux pollinisateurs de lutter contre les nuisibles.

” L’impact du bocage sur la biodiversité peut localement être fort puisque le bocage dense représente 45 % des réservoirs régionaux de biodiversité. “

Les dynamiques bocagères d’hier et d’aujourd’hui

 

La période du néolithique est considérée comme le début de l’agriculture : la diminution des ressources pour les chasseurs-cueilleurs amène les populations humaines à se sédentariser et à entreprendre la domestication des espèces animales et végétales. C’est là que commencent à apparaitre les haies, végétales ou minérales (constituées de cailloux), dans un but de clore, délimiter un espace, se protéger, et même de se nourrir avec des essences fruitières.

L’augmentation des besoins en céréales au Moyen-Age entraine de grands défrichements des forêts et des landes pour rendre les terres arables, bordées en certains endroits par des bandes boisées. Les propriétaires enrichis cloisonnent alors les parcelles où la terre est la plus riche par des talus et des haies, pour empêcher les fuites vers les bas de vallées.

Le bocage va donc s’étendre au fur et à mesure des périodes et des régions, jusque dans les années 1950. Cette date marque l’arrivée de l’agriculture intensive en Europe : la mécanisation des engins agricoles et l’intensification des cultures nécessitent des parcelles de plus en plus grandes. Les haies bocagères, devenues encombrantes et gênantes pour les manœuvres des tracteurs, sont arrasées et détruites à la suite du remembrement agricole. La haie perd alors son caractère juridique propre.

Selon une étude réalisée en 2012 par l’EPAGA sur 24 communes du bassin versant de l’Aulne, environ 50 % du bocage aurait disparu entre 1961 et 2009.

Actuellement, bien que les arasements aient beaucoup diminué, le bocage continu de reculer et fait face à un manque de renouvellement et d’entretien. Selon l’enquête réalisée par la DRAAF Bretagne en 2008, les linéaires bocagers diminuent d’environ 1 % par an en Bretagne.

Evolution du paysage bocager entre 1950-1965 (gauche) et 2020 (droite) sur la commune du Moustoir (22). Source: https://remonterletemps.ign.fr/

Afin de connaitre l’évolution du paysage autour de chez vous, vous pouvez vous rendre sur le site de Remonter le temps.